lundi 23 février 2015

Jean-Luc Touly : Les reprises en régie de l'eau « gagnent du terrain »

Jean-Luc Touly : Les reprises en régie de l'eau « gagnent du terrain »     

           

    Conseiller régional d’Île de France, délégué syndical chez Veolia et membre de la Fondation France Libertés, cet « expert » défendra à la Gremme l’idée d’une autogestion de l’eau.


Parmi les invités de la Gremme (Grande Rencontre Euro-Méditerranéenne de Marseille sur l’Eau) organisée par l’association Eau bien commun Paca au Conseil régional ce vendredi 6 et samedi 7 février, on retrouve Jean-Luc Touly. Très calé sur les questions de gestion de l’eau, auteur d’ouvrages détonnants et volontiers provocateur, il vient animer un atelier sur « le mouvement des citoyens pour l’auto-gestion de l’eau ». Entretien.

Délégué syndical, auteur, élu... Vos casquettes sont multiples. A quel titre venez-vous à Marseille ?

Mon parcours est multiple parce que je dérange. Là, je viens en tant que responsable « eau » au sein de la fondation France Libertés de Danielle Mitterrand, avec Anne Le Strat. Nous devrions intervenir également avec un représentant d’un mouvement citoyen allemand. L’idée c’est de montrer que le combat des associations, qui prônent une gestion citoyenne de l’eau, porte ses fruits. Après l’Italie, l’Allemagne, l’Irlande même l’Amérique latine qui a refusé la privatisation de l’eau, il y a aussi eu cette pétition lancée au niveau européen [pour que l’eau soit un bien public NDLR] qui a recueilli 1,8 million de signatures. Désormais en France, les régies gagnent du terrain sur les délégations de service public. Et les communes passées en régie de droite comme de gauche ne sont pas revenues au privé.

Jusqu’alors en France, la gestion de l’eau était pourtant sous la coupe des grandes entreprises...

Oui mais la tendance s’inverse. Notamment après la loi Sapin sur la transparence des marchés publics ou l’arrêt du conseil d’État du 8 avril 2009 qui limite la durée des contrats à 20 ans et ce, de façon rétroactive, jusqu’au 3 février 1995. Tout ça a joué. A la suite des re-municipalisations des eaux de grandes villes comme Grenoble ou Paris, où le prix de l’eau a baissé, les contrats passés entre les grandes sociétés et les communes ont été renégociés avec des tarifs nettement moins importants. Quand elles perdent des parts de marchés, ces sociétés utilisent comme variable d’ajustement les salariés pour ne pas entamer la rémunération des actionnaires. Veolia, où je suis délégué syndical, envisage des plans sociaux. Après un plan de départs volontaires de 2 000 personnes fin 2015, un deuxième plan social de 1 300 autres est prévu. Cela ne s’est jamais vu. Ce genre de secteur était florissant, on avait pris l’habitude que les contrats soient re-signés à 95%. Marseille ou Lille sont en ce sens emblématiques.

Justement à Marseille, le parquet financier a ouvert une enquête sur les marchés passés avec Veolia et Suez. Quel regard portez-vous sur cette situation ?

C’est une situation que je dénonçais il y a des années de ça quand je suis venu à Marseille répondant à l’invitation de messieurs Piel [conseiller régional PCF, président du groupe Front de gauche au conseil régional NDLR] et Pellicani [conseiller d’arrondissement PCF]. Nous avons travaillé aux côtés d’Eau bien commun Paca sur les contrats de délégation de service public pour les dénoncer. Je ne suis pas surpris. Restent des inconnues comme le renouvellement des réseaux, le nombre de salariés ou ce qui a été réellement financé des infrastructures. L’eau est un monde gangrené. Je suis d’ailleurs en train d’écrire un livre « les recasés de la république » sur le sujet qui devrait sortir en avril.

 
Propos recueillis par Mireille Roubaud

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